Fashion revolution : qu’est-ce qui a changé 11 ans après l’effondrement du Rana Plaza ?

Clara-Douce McGrath 24 avril 2024

Il y a 11 ans, l’usine du Rana Plaza s’effondrait. Un an plus tard, Fashion Revolution, une ONG qui milite pour des conditions de travail décentes pour les ouvriers textiles au Bangladesh naissait. Quelles sont les avancées 10 ans plus tard ? On vous fait le tour de la question. 

L'effondrement du Rana Plaza, survenu le 24 avril 2013 à Dacca, Bangladesh, a été un événement dévastateur qui a ébranlé l'industrie de la mode à l'échelle mondiale. Le bâtiment, abritant des ateliers de confection pour diverses grandes marques occidentales, a coûté la vie à 1 130 personnes, avec plus de 2 000 autres blessés parmi les ouvriers du textile. Parmi les marques impliquées figuraient des noms bien connus comme H&M, Zara, La Halle, ainsi que d'autres marques australiennes et américaines. 

C'est quoi le Rana Plaza ?

L'effondrement du Rana Plaza n'a pas seulement été une tragédie humaine, mais a également révélé les injustices systémiques au sein de l'industrie de la mode. Les conditions de travail déplorables dans lesquelles les ouvriers du textile opéraient étaient depuis longtemps une réalité tacite, mais l'ampleur de la catastrophe du Rana Plaza a jeté une lumière crue sur ces pratiques inhumaines

Les témoignages des survivants ont mis en évidence les pressions subies pour travailler dans un bâtiment dangereux, les salaires dérisoires, les longues heures de travail et les violations flagrantes des normes de sécurité. Malgré les progrès réalisés dans certains domaines de l'industrie, de nombreuses marques continuent de privilégier les profits au détriment de la vie humaine et du bien-être des travailleurs. 

Oxfam Australie a mis en lumière qu’un t-shirt acheté 29€ dans le commerce ne rapportait que 0,6% à l’ouvrier, alors que 68% du prix sont dédiés à la marge de la marque et du magasin. Des chiffres qui n’ont pas évolué depuis l’effondrement du Rana Plaza et qui contribuent à la situation précaire des ouvriers textiles au Bangladesh. 90% de ces travailleurs disent que leurs salaires ne leurs permettent pas de subvenir aux besoins essentiels de leurs foyers.

Une prise de conscience dans le monde de la mode

L'effondrement du Rana Plaza a été un catalyseur pour une prise de conscience mondiale sur les conditions de travail dans l'industrie de la mode. Les images poignantes des débris du bâtiment et des personnes piégées sous les décombres ont déclenché une vague d'indignation et de demandes de réformes.

L’ONG Fashion Revolution est née de cette volonté de transformer l'industrie de la mode en une force positive pour le changement. Créée par Carry Somers et Orsola de Castro dans la foulée de la catastrophe du Rana Plaza, l’association a pour but de faire changer les pratiques dans l’industrie de la mode. Avec son appel à une mode plus éthique, transparente et durable, l'organisation a rassemblé des millions de personnes à travers le monde pour exiger des comptes aux marques et aux entreprises qui tirent profit de la souffrance humaine et de l'exploitation environnementale. Chaque année, l’association organise une semaine de mobilisation pour mettre en avant ses trois principales revendications : un salaire juste pour les travailleurs textiles, un mode de production plus respectueux de l’environnement et un prix juste des vêtements.

Quelles sont les revendications de Fashion Revolution France, l'association de Catherine Dauriac ?

Les revendications de Fashion Revolution sont ancrées dans des principes de justice sociale, économique et environnementale. L'organisation plaide pour des salaires équitables pour les travailleurs du textile, une production respectueuse de l'environnement et une plus grande transparence tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Un travail de sensibilisation qui est encore très nécessaire selon Catherine Dauriac : "Aujourd'hui, c'est surconsommer, acheter des vêtements neufs et ça n'a pas d'importance parce que ce n'est pas cher. Mais pourquoi ce n'est pas cher ? Parce que c'est l'ouvrier qui paye au bout de la chaîne. 80 % de femmes et d'enfants travaillent sur cette chaîne de valeur. Et ça, il faut le répéter."

La question des salaires est particulièrement préoccupante. Dans de nombreux pays producteurs de vêtements, les travailleurs sont confrontés à des salaires de misère qui ne leur permettent pas de subvenir à leurs besoins les plus élémentaires. Le salaire d’un ouvrier au Bangladesh continue de stagner autour de 85€ par mois, pas assez pour permettre de nourrir un foyer et de scolariser les enfants de la famille. Les revendications de Fashion Revolution appellent à des lois qui obligent les entreprises à payer des salaires décents et à respecter les droits fondamentaux des travailleurs. En 2019, des manifestations réclamant des augmentations de salaires ont fini dans le sang et des centaines d’arrestations arbitraires. 

Les revendications de Fashion Revolution reposent sur des principes de justice sociale et environnementale. Elles mettent l'accent sur la nécessité de salaires équitables, d'une production respectueuse de l'environnement et d'une plus grande transparence sur le coût réel de la production de vêtements, notamment à destination des consommateurs. Les chiffres révèlent l'ampleur des défis : selon un rapport d'Oxfam Australie, la grande majorité des ouvriers du textile au Bangladesh déclarent que leurs revenus ne couvrent pas les besoins essentiels de leur foyer.

Comment la France s’engage pour une industrie textile plus juste ? 

Face à ces enjeux, la France a pris une mesure significative pour réguler l'industrie de la mode. La loi sur le devoir de vigilance des entreprises, adoptée en 2017, contraint désormais les grandes multinationales à surveiller et prévenir les risques d'atteintes aux droits humains et à l'environnement le long de leur chaîne d'approvisionnement. Les entreprises sont donc responsables des pratiques de leurs sous-traitants, et peuvent être condamnées en cas de non-respect de ces obligations. En plus, l’adoption de la loi pour la limitation de la fast fashion adoptée en mars 2024 interdit la publicité pour les vêtements à prix cassés et impose un malus environnemental renforcé. Ces initiatives témoignent de l'engagement de la France à lutter contre la fast fashion et de l'ambition des décideurs de sensibiliser les consommateurs aux dérives de l'industrie de la mode. 

 

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