"C'est impossible, je ne peux pas manquer cette soirée, je ne DOIS pas manquer cette soirée". Mais pourquoi ? Des soirées, il y en aura d'autres.

Et si c'était la FOMO ? Ce terme est assez nouveau, pourtant le phénomène l’est beaucoup moins. Le FOMO, comme il se fait appeler, est l’acronyme de "fear of missing out", ou la peur de rater quelque chose en français.

Simple phénomène social pour le moment, les psychologues pensent qu'il s'agira à terme d'un syndrome psychiatrique. Lorsque l'on vous dit qu'il ne date pas d'hier, c'est que Gustave Flaubert en parlait déjà en dépeignant le portrait d'Emma Bovary, héroïne du roman éponyme... au 19e siècle ! On le définit souvent comme ce sentiment de frustration éprouvé par Madame Tout-le-Monde chaque fois qu’elle constate combien son quotidien est pauvre. Aux dires des analystes de l’époque, nous serions toutes peu ou prou des Emma Bovary 2.0. Quand elle puisait ses fantasmes d'une vie mondaine de princesse dans des romans à l'eau de rose, nous aurions désormais comme puits d’amertume sans fond les réseaux sociaux.

Surprenant ? Pas tant que ça. Sur le Web, le bonheur dégouline, chacun expose la moindre parcelle de son existence. Après tout, les réseaux sociaux sont faits pour partager nos moments de vie avec nos followers (ndlr : abonnés), qu'ils soient des amis ou des inconnus. Mais l'un des effets insoupçonnés de ces réseaux (a)sociaux est celui d'un sentiment intense de frustration. En effet, même si nous tentons de ne pas comparer notre vie à celle des autres, il nous reste toujours une vague impression de passer à côté des choses, de nos week-ends, de nos familles, de nos vies...

De la frustration, rien de grave a priori. Tout être humain en a déjà ressenti au moins une fois dans sa vie, à différente échelle. Mais voilà, la FOMO va au-delà de ce sentiment classique. Véritablement, les personnes qui en souffrent éprouvent une phobie, une anxiété de ratage, une peur incommensurable de louper une information, un évènement.

Là où cela commence à poser problème, c'est lorsque le sentiment de frustration est tel qu'il en devient handicapant : on veut être de partout, tout le temps. Pourtant, l'humain ne peut être omniprésent. Et parfois, un choix s'impose : à quelle soirée vais-je me rendre samedi soir ? Pour une personne souffrant de FOMO, la question sera plutôt : à quelle soirée vais-je être contrainte de renoncer ? Un véritable dilemme cornélien fait surface, et une réflexion torturante nous foudroie.

Pour identifier ce syndrome mais surtout le comprendre, voici plus en détail en quoi consiste le FOMO. Mais surtout, voici comment parvenir à s'en débarrasser, ou du moins à vivre plus confortablement avec. 

Enjoy,

Les Éclaireuses 

 

Le FOMO, qu'est-ce que c'est ?

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La fear of missing out, aka la peur de manquer quelque chose. Comment peut-on craindre de passer à côté de quelque chose, alors qu'on ne sait même pas si cette chose que l'on redoute de manquer va arriver ? 

Plus qu'une simple crainte, il s'agit d'une véritable peur. La FOMO n'a pas une manifestation unique. La peur de ne pas être au courant d'une tendance, d'une sortie entre amis, mais aussi la peur de ne pas avoir saisi la meilleure opportunité. Et si l'évènement auquel vous n'assistez pas était LA soirée dont tous vos copains allaient parler ce mois-ci ? Cela s’applique à tous les domaines : et si je regrettais d’avoir pris ce boulot plutôt que cette autre opportunité à Londres ?

Elle demande alors d'être sur le qui-vive en permanence. Si on dit souvent avec plaisanterie "j'ai loupé un épisode ?", en réalité, pour les personnes atteintes de FOMO, "louper un épisode" peut devenir source d’une angoisse profonde, obsessionnelle même, au point de remettre en question nombre de leurs choix et de ne plus pouvoir décrocher de leur vie sociale, réelle ou numérique. 

 

Des conséquences bien réelles sur la santé mentale

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Se demander en permanence quel est le meilleur choix à faire, regretter probablement une fois que celui-ci est fait, c'est épuisant. On le disait, le FOMO est à l'origine d'une angoisse profonde, d'une réflexion permanente qui devient une obsession.

Le FOMO enclenche ainsi plusieurs sentiments négatifs : une peur de se retrouver exclu, de ne plus être apprécié par notre entourage et une peur de manquer une opportunité (jusqu'à l'impression de passer à côté de sa vie).

Plus encore, le syndrome est susceptible de nous pousser à accomplir des choses que l'on ne souhaite pas, mais que l'on fait par contrainte. Pourtant paradoxalement, cette contrainte, c'est nous-mêmes qui nous l'imposons

 

D'où vient ce syndrome ?

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Le plus compliqué dans ce syndrome, du moins pour la personne qui en souffre, c'est qu'elle sait probablement qu'elle est la seule source de son mal-être, de sa souffrance. Cette pression qu'elle s'exerce pour être présente en permanence, elle en est la seule à l'origine

Toutefois, une nuance mérite dès lors d'être faite. Depuis le développement des réseaux sociaux, les cas de FOMO se sont accrus. Pourquoi ? Car l'essence même de ces réseaux est de livrer régulièrement à ses amis des extraits version enjolivée de sa petite existence. Cette dernière est dorénavant obligatoirement jalonnée, via des photos attrayantes, de vacances paradisiaques, de baby showers de rêve, d’enfants parfaits, de fêtes mémorables, de cadeaux insensés, de cupcakes inouïs, de chiots adorables, de spas de folie... selon les standards lifestyle de chacun. Tout en censurant pudiquement le reste, plus médiocre, évidemment. Et le plus fourbe, c'est que bien souvent, on ne se rend pas compte de cet impact négatif et oppressant sur notre santé mentale que provoque la contemplation de toutes ces paillettes. 

Avec le boom des influenceurs en tout genre sur Instagram et compagnie, la FOMO a de quoi être alimentée. Pour autant, peut-on diaboliser tous ces comptes qui nous font rêver et qui peuvent être à l'origine de frustration ainsi que de notre envie de tout vivre à fond ? Une réelle question, qui ne semble pas avoir de réponse unique. 

 

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Qui peut être concerné par le FOMO ?

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Le syndrome du FOMO se retrouve davantage chez les jeunes. Selon une étude réalisée par EventBrite, 69% des 20-40 ans seraient touchés par le FOMO. Le pourcentage chute en dessous des 20% à partir de 50 ans. En cause, la forte proportion de ces populations à être présentes sur les réseaux sociaux.

Peu de recherches psychologiques et non marketing ont été réalisées. Néanmoins, l'étude d'Andrew Przybylski (à l’époque chercheur à l’université d’Essex en Angleterre) datant de 2013 a tout de même mis en lumière que les personnes les plus touchées étaient celles qui avaient des besoins sociopsychologiques insatisfaits, notamment dans le fait d’être aimées ou d’être respectées. Ils ont aussi montré que les personnes les plus touchées étaient celles qui utilisaient le plus les réseaux sociaux.

  

Comment savoir si j'ai le FOMO ?

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Non, vous n'êtes pas atteinte de FOMO si vous êtes simplement triste de rater l'after-work d'Ernestine jeudi. Pour vous aider à savoir si vous êtes concernée par le FOMO, voici une liste de questions à laquelle vous pouvez répondre.

- En week-end et surtout en vacances, ai-je besoin de consulter les réseaux sociaux ?
- Consultez-vous les réseaux sociaux même pendant les repas ou lors de soirées avec vos amis ?
- Activités, soirées, vacances : est-ce que je pense à ce que je vais pouvoir poster sur les réseaux sociaux ?
- Suis-je mal à l’aise quand je ne peux pas consulter les réseaux sociaux ?
- Suis-je mal à l’aise quand je ne peux pas participer à un évènement où mes amis vont ?
- Est-ce qu’un sentiment de malaise ou de jalousie m’envahit quand je vois les photos de mes connaissances sur les réseaux / à des activités où je n’ai pas été conviée ?

Si vous vous reconnaissez dans plusieurs de ces interrogations, nul doute, vous êtes concernée par le FOMO.

Rassurez-vous, dans la plupart des cas, le FOMO n'est pas grave en soi. On comprend bien que ce peut être une torture mentale, mais pas de panique, votre vie peut continuer. 
Cependant, cela devient plus préoccupant lorsqu'un certain nombre de symptômes se développent. Des difficultés de concentration, une agitation intérieure, du stress, des troubles du sommeil, des troubles psychosomatiques (maux de tête, sueurs, etc.), voire, pour certains, un état dépressif. Si vous êtes dans l'une de ces situations, n'hésitez pas à consulter un spécialiste.

 

Mais alors, comment se débarrasser du FOMO ?

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Tradction: joie de rater quelque chose. Se sentir satisfait de ne pas sortir et de se déconnecter pour prendre soin de soi.

Avant toute chose, il est nécessaire de prendre conscience de son état. Tout processus de guérison débute par la bonne connaissance de la situation. Rien ne sert de se voiler la face, bien au contraire, vous ne faites que refouler un problème qui peut être résolu. 

Face au FOMO se développe le Nesting, une tendance qui consiste à refuser une soirée ou autre pour rester tranquillement chez soi. Aussi curieux que cela puisse paraître, si vous hésitez entre deux évènements, n'hésitez pas à dire non au deux. Une solution quelque peu radicale et violente, mais comme on dit, "il faut parfois se faire violence", et cela vous prouvera que, finalement, louper une soirée ne va pas changer le cours de votre vie. Qu'est-ce que vous allez louper à part voir Christian bourré faire des roulades dans le jardin ? Vos amis ne vont pas vous oublier le temps d'une soirée, et Karine ne va pas devenir Jennifer Lopez en une soirée.

Si vous n'en êtes pour le moment pas capable, commencez par prendre des moments de déconnexion, en procédant par étape. Il est nécessaire de vous écouter, tout en ne perdant pas de vue votre objectif de vous libérer de la FOMO. Après tout, vous vous connaissez mieux que personne.

Un conseil essentiel, vivez le moment présent. Avec la FOMO, vous ne vivez pas l'instant présent, vous êtes dans le futur en anticipant ce qu'il pourrait se passer, et dans le passé en regrettant déjà d'avoir loupé un évènement qui ne s'est même pas encore déroulé. Soyez reconnaissante de ce que vous vivez chaque jour. Pour cela, vous pouvez tenir un cahier de reconnaissance, ou exercer la pensée positive. Chaque jour, écrivez ou dites à haute voix trois choses pour lesquelles vous êtes reconnaissante. Vous visualiserez tout le positif qui vous entoure. Craindre de manquer un évènement parmi tous ceux que vous expérimentez déjà au quotidien vous paraîtra moindre. 

Enfin, cultiver la compassion de soi, c'est-à-dire apprendre à se relier à nous-mêmes avec une attitude d'attention, de gentillesse et d'acceptation est essentiel. Vous êtes autosuffisante, votre bonheur ne dépend que de vous. Comprenez que vous êtes actrice de votre vie, et qu'une décision ne scelle pas votre futur à tout jamais. Et puis après tout, peut-être qu'il y a une part de destin dans nos vies. Alors parfois, laissons-la vie nous mener là où le vent nous mène, et fiez-vous à votre instinct.