Pour mettre en lumière les violences éducatives ordinaires, elle a fait le choix de les dessiner

Juliette Gour 04 janvier 2021
Mis à jour le 11 mai 2023

L'éducation des enfants est un sujet aussi épineux que la politique. De nombreux clans s'opposent sur la question. L'illustratrice Fanny Vella a décidé de dénoncer les violences éducatives ordinaires à travers ses dessins, le tout, dans un angle qui pousse à la réflexion.

Qu'est-ce que les violences éducatives ordinaires (VEO) ? C'est un vaste sujet qui englobe énormément d'actions que subissent les enfants au quotidien. Les premiers fautifs ? Les parents. Même si, souvent, les VEO sont inconscientes et découlent souvent d'habitudes éducatives héritées par les générations antérieures, elles n'en restent pas moins traumatiques pour les enfants. On la qualifie d'ordinaire parce que, justement, ce sont des violences qui ont été intégrées par tout le monde, si bien qu’elles finissent par ne plus choquer. 

On pense souvent, à tort, qu'il est possible de tout imposer à un enfant, qu'il se soumettra forcément à la volonté de ses parents sans opposer la moindre objection. Dans les faits, c'est vrai. Ce que le parent veut, l'enfant finit par faire. Mais, en changeant l'angle de vue, on peut prendre toute la mesure de la violence de ces actes. 

C'est de ce postulat qu'est partie l'illustratrice Fanny Vella. Dans ces dessins, elle a décidé de changer l'angle de vue pour mettre en lumière l'évidence. Suivie par près de 120 000 personnes sur Instagram, l'illustratrice lance un hashtag en 2018 qui deviendra la genèse de tout un travail de déconstruction. Depuis le lancement de #etsionchangeaitdangle, l'illustratrice a publié des dizaines de dessins et un livre qui combine toutes ses illustrations de violence ordinaire. La clé de son travail, remplacer les enfants par des adultes dans ces dessins. Ainsi, on se rend rapidement compte du ridicule de certaines situations. 

Il faut savoir que depuis 2019, les actes de violence éducative, type gifle ou fessée, sont interdits par la loi. Bien qu'il soit très difficile de contrôler ça, il est encore plus délicat de savoir réellement ce qu'il se passe au sein de chaque foyer. Pire encore, on ne sait jamais quel mot ou quel acte aura un impact sur l'enfant. Dans les violences éducatives, il faut bien englober toutes les violences, qu’elles soient physiques ou psychologiques. 

Les dessins mettent en lumière l'absurdité des attentes des adultes vis-à-vis des parents. Nous avons tendance à imposer des idées et des actions qui n'ont ni justification ni raison. Elles viennent seulement servir le sentiment de contrôle des parents. 

Découvrons ensemble quelques points évoqués par l'illustratrice et déconstruisons les idées préconçues sur l'éducation. 

Enjoy

Les Éclaireuses

 

1. Forcer son enfant à finir son assiette peut s'apparenter à de la VEO

 
 
 
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On l'a tous entendu petit cette phrase : "finis ton assiette sinon tu ne sors pas de table". Pire, certains enfants sont même contraints de manger dans la même assiette à tous les repas jusqu'à ce qu'ils en aient fini le contenu (#lesepinnarsaupetitdej). Alors, même si cela part d'un bon sentiment, qu'il faut faire comprendre aux enfants qu'il ne faut pas gaspiller de la nourriture et qu'ils ont de la chance de pouvoir être nourris à leur faim (quoique la comparaison avec les petits Somaliens n'est pas forcément obligatoire), il faut essayer de respecter les envies de l'enfant. Lui servir une assiette trop généreuse, sans lui laisser le choix, le forcer à finir son assiette, alors qu'il vous dit qu'il n'a plus faim... Autant d'actions qui peuvent avoir des répercussions psychologiques de l'enfant. Il y a un juste-milieu bien sûr, l'enfant ne peut pas manger trois petits pois à chaque repas. Mais croyez-le ou non, au moment où il aura faim, il mangera. 

Petit coup de pouce pour aider un enfant à finir sa soupe : faites un concours de celui qui fait le plus de bruit ou qui aspire la soupe à la paille le plus rapidement. Vous verrez, le bol se videra comme par magie !

 

2. "Laisse-le pleurer, il faut qu'il s'habitue à se débrouiller tout seul et à se passer de toi"

 
 
 
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Comprenez une chose, c'est que si un enfant pleure, c'est qu'il a besoin de quelque chose. Que ce soit de l'attention, un message à vous faire passer, pour signifier la peur, la faim... Un enfant ne pleure pas en vain. Imaginez-vous à sa place, seul dans un lit, dans le noir, avec un fort sentiment de peur. Vous appelez à l'aide, vous savez qu'il y a quelqu'un dans la maison qui peut vous aider, mais cette personne ne vient pas. Au niveau de l'estime de soi et du sentiment d'abandon, on est au maximum. Même s'il arrive que des enfants soient dans des phases de caprices, qu'ils vous rendent la vie impossible, que vous ayez envie de le jeter par la fenêtre, s'il se manifeste, c'est qu'il y a une raison. Et même si c'est un conseil qui est encore beaucoup diffusé, il est à prendre avec des pincettes. Ce n'est pas parce que les femmes de la famille laissent pleurer les enfants dans le noir depuis douze générations que vous devez perpétuer la tradition

 

3. Se plaindre des enfants devant les enfants, un acte d'une violence incroyable

 
 
 
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Ce n'est pas parce qu'il est petit qu'il ne comprend pas. Pire, ce n'est pas parce qu'il est petit qu'il n'enregistre pas. Des psychologues ont mis en lumière la résonnance que peut avoir une parole en l'air sur un enfant. En grandissant, on construit tous une image de l'estime de soi et les facteurs extérieurs sont primordiaux pour accompagner cette construction. Ainsi, une sous-valorisation ou un mot malheureux jeté sur le coup de la colère ou de la fatigue peut avoir une répercussion beaucoup plus profonde qu'on ne le pense chez l'enfant. Mettez-vous à sa place. À entendre toute la journée que vous épuisez les gens et que vous êtes insupportable, votre égo risque d'en prendre un coup. Ce n'est pas plus différent pour les enfants.

 

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4. "Oh, arrête ton cinéma, c'est trois fois rien"

 
 
 
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Si vous souhaitez transformer votre enfant en cailloux, continuez comme ça. Avec un peu de chance, il aura énormément de mal à écouter ses émotions ou à dire ce qu'il ressent quand il sera plus grand. C'est caricatural, mais il y a un fond de vérité. Si vous ne faites pas preuve d'empathie envers votre enfant, comment voulez-vous qu'il en ait plus tard ? Il est important de savoir différencier le "vrai cinéma" du faux. Effectivement, il est possible que votre enfant n'ait pas vraiment mal au ventre et qu'il veuille juste sécher l'école ce matin. Par contre, après une chute, il se peut qu'il ait eu plus peur que mal, mais la peur est aussi une émotion à prendre en compte. Au lieu de minimiser la chute, aidez-le à identifier ce qui le fait pleurer : la douleur ou la peur. L'enfant se sentira rassuré et il se peut que l'évènement un peu dramatique s'évapore de lui-même, sans avoir besoin de lever la voix. 

 

5. Non, il n'est pas obligé de prêter son jouet s'il n'a pas envie

 
 
 
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Vous aimeriez, vous, prêter votre voiture ou votre vélo à un illustre inconnu ? Pas vraiment. C'est pareil pour les kids. Sous couvert de l'apprentissage du partage, on leur impose énormément de choses. Apprenez-lui à partager avec les enfants qu'il connait, et en qui il peut avoir confiance. La notion de bien est très particulière pour les enfants, il est donc encore plus difficile pour eux de concevoir le prêt, encore plus quand c'est un enfant qu'ils ne connaissent pas. Ils sont comme nous, ils ont besoin de se sentir en confiance pour accepter de prêter. Au lieu d'imposer le prêt d'un jouet immédiatement, commencez par faire les présentations entre les enfants pour les mettre sur un pied d'égalité. Et gardez en tête que s'il tient vraiment à son jouet et qu'il ne veut pas le prêter, cela n'a rien de dramatique, il y a sûrement plein d'autres voitures dans le coffre à jouets pour l'autre enfant. 

 

6. Laisser les enfants vivre à leur rythme, sans leur imposer les choses

 
 
 
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Vous n'aimez pas être dérangé quand vous passez un bon moment. C'est pareil pour votre progéniture. Lui imposer un rythme, vos envies, sans écouter les siennes, cela peut s'avérer être très violent pour lui. Pour ce qui est du bain, évidemment que vous n'allez pas le laisser se transformer en mouillette, mais s'il demande 5 minutes de rab dans son bain chaud, il n'y a pas mort d'homme. Laissez-le profiter des moments de détente, un jour, il sera prêt à payer pour 30 minutes de sérénité dans un bain bouillonnant.

 

 

7. Personne n'aime la pression, même les enfants

 
 
 
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Vous adorez détester ce boss qui est sur votre dos toutes les 5 minutes avec un timer ? Dites-vous que vous faites pareil avec votre enfant quand il n'effectue pas immédiatement une action. Là aussi, il faut savoir faire le tri : il est en train de faire une bêtise et il doit arrêter immédiatement, ok. Il est tranquillement en train de jouer et vous avez une irrépressible envie de lui demander de "venir tout de suite à la cuisine pour une inspection générale", pas ok. Comme vous, il a besoin de comprendre les choses, de savoir pourquoi on lui demande de faire ça. Miser sur l'explication plutôt que l'injonction et la pression est toujours la bonne solution.

 

8. Faire preuve de cohérence dans l'éducation, c'est la clé

 
 
 
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Répondre à la violence par la violence, que l'on soit adulte ou enfant, ce n'est jamais une idée brillante. On peut tout à fait comprendre que, parfois, les nerfs lâchent et des envies de violence viennent se manifester. Mais, expliquer à un enfant qu'il ne faut pas taper les autres en le tapant, ce n'est pas vraiment de l'éducation positive. Au contraire, envoyer des messages contradictoires n'arrangera pas le problème. Pire, l'enfant risque de recommencer, encore et encore, vu que maman, quand elle n’est pas contente, elle tape. Dans le fond, il se dit que lui aussi peut faire pareil, vu que maman le fait. 

 

9. Les punitions, un gros dossier de l'éducation

 
 
 
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Ça vous viendrait à l'idée, vous, de punir votre mari parce qu'il a mal travaillé. C'est pareil avec un enfant. Encore une fois, il faut faire preuve de jugeote et de communication. Au lieu de monter dans les tours et de punir sans discussion, essayez de comprendre ce qu'il s'est passé. Est-ce que l'enfant a perdu ses moyens, est-ce qu'il était stressé ou est-ce qu'il va admettre qu'il n'a pas travaillé ? Encore une fois, pas question de laisser l'enfant faire ce qu'il veut, mais en cas de mauvaise note, surtout si c'est la première fois, essayez de comprendre d'où vient le problème. L'enfermer dans sa chambre pour le faire travailler jusqu'à épuisement n'arrangera pas forcément le problème initial. Essayer de forcer l'apprentissage sans comprendre d'où vient le problème, c'est comme essayer de faire rentrer un rond dans un carré, c'est stérile. 

 

 

10. Il faut comprendre qu'un enfant, ce n'est pas un petit truc stupide sans émotion, c'est juste un mini adulte en construction

 
 
 
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Et en tant que parent, vous êtes là pour accompagner son développement, pas pour imposer votre vision et vos choix. On pense souvent que l'on connait parfaitement ses enfants parce qu'on les a fabriqués. Mais, il arrive que l'on soit face à des situations inédites, qu'on n’aurait même pas soupçonnées chez nos petites têtes blondes. La parentalité, c'est surtout un émerveillement quotidien de ce que les enfants sont capables de faire. Parce que, quoi que vous pensiez, ils sont capables de beaucoup de choses de leurs petites mains, et ils peuvent être très débrouillards quand on leur laisse l'opportunité. 

 

De nombreuses autres illustrations de qualité sont à retrouver sur le compte Instagram de l'illustratrice Fanny Vella.

 
 
 
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Tags : grossesse

Juliette Gour
Chef de rubrique Bien-Être & Beauté
Amoureuse de la K-beauté, Juliette est également une experte en skincare, vous dévoilant les secrets des masques et des nouvelles routines beauté adoptées par vos stars préférées. Suivez cette passionnée polyglotte pour une aventure pleine de découvertes, de bien-être et de conseils avisés qui vous guideront vers une vie épanouissante et captivante. C'est grâce à sa licence en science du langage que Juliette manie comme personne les modes de pensées des différentes cultures, ce qui la pousse à voyager et à découvrir les diverses façons de penser qui enrichissent son approche du monde.

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